L'art animalier, souvent jugé "mineur", recouvre ses lettres de noblesse depuis quelques années. François Pompon prônait un retour à la nature, principe de son grand maître Rodin. Un autre artiste du XXIe siècle travaille l'épure plutôt que le réalisme, Richard Orlinski. Retour sur ces deux célèbres artistes qui ont simplifié les formes de la nature.
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- 20x28xcm
François Pompon, le sculpteur aux deux visages :
Le sculpteur morvandeau a choisi l’animal comme emblème. Tournant le dos au portrait et à la figure au sein du monde de la sculpture, ce choix audacieux lui a permis de se révéler.
Il existe donc deux François Pompon.
Le premier est né en 1855, enfant du Second Empire, sous Napoléon III, empereur des Français. Ses oeuvres sont à l’image de celles de ses professeurs académiques : Pompon réalise des terres cuites, des portraits et des bustes. Les plus connus sont ceux de ses parents et de sa famille.
Des modèles accessibles, gratuits, parfait pour s’exercer dans son art. Son père Alban (artisan-compagnon) et sa mère Claudine se prêtent à l’exercice tout comme Hector, son frère jumeau.
L’autre visage de Pompon, celui qu’on connaît tous, c’est le sculpteur animalier. Celui qui construit des corps fuselés, aérodynamiques, en complète opposition avec le style Art nouveau. Ce nouveau Pompon s’affirme à l’aube des années 1900, durant la Belle Époque, marquée par de nombreux progrès sociaux, économiques et technologiques.
Mais d’où vient cette inspiration ?
Autant d’animaux dans une vie, des coqs, des ours, des lapins, des chouettes, des aigles, des ânes, des lions et même des dragons.
Cela s’explique dès l’enfance. François Pompon venait admirer les chapiteaux romans, dont le bestiaire fascine toujours autant.
Ces édifices, relativement bas, étaient à la portée de tous les regards. Les sculptures, s’inspirant des récits bibliques, donnaient libre cours à l’imagination du sculpteur.
En admirant le travail de François Pompon, on découvre un refus de l’expression par le creux, ce qui implique une absence totale d’ombres. La sculpture se doit d’être lisse, éclatante, blanche comme le marbre qu’il avait coutume de tailler après s’être exprimé sur le plâtre.
La première période de l’artiste, de 1900 à 1918, s’opère sous le signe des animaux de la ferme. Ce sont les premières expérimentations de Pompon. Ce sont les bréviaires de la recherche du mouvement, qui tendront vers une simplification toujours accrue.
De 1922 à 1929, Pompon s’affirme dans un style qui le caractérise. Une recherche vers l’essentiel dans le mouvement, qui se traduit par une netteté du dessin, la concision de la forme.
Pompon voulait restituer l’expression réelle de l’animal dans sa plus grande simplicité.
L'Ours polaire blanc du sculpteur François Pompon, une pièce iconique :
C’est sans conteste son oeuvre majeure, la plus célèbre. Vitrine d’une perfection singulière, l’oeuvre se révèlera au grand public en 1922, lors du Salon d’automne.
L’exposition présente un grand Ours blanc en plâtre. L’immense talent de François Pompon est enfin révélé, le projetant dans un avenir glorieux. La reconnaissance du public, des artistes et de la presse va lui donner des ailes. L’oeuvre de Pompon intervient durant les Années folles, période trépidante de joie et d’insouciance, moment de bonheur suite aux années de guerre.
Les goûts sont alors favorables à un retour au volume, une douceur synonyme d’apaisement. Son atelier, situé à Montparnasse, Rue Campagne-Première, quartier emblématique des Années folles, était facilement reconnaissable par les visiteurs : une tête ours, taillé en pierre, trônait à l’entrée, fixée sur la porte.
À l’intérieur, rien n’est ostentatoire. L’atelier occupe le rez-de-chaussée. Il semblerait que cet espace ait été occupé comme réserve d’un tripier.
Pompon fait désormais partie de la nouvelle École française de la sculpture classique. Le célèbre Ours Pompon va alors être décliné en une multitude de matières, imposant parfois des modifications quant à sa forme.
Mais le plâtre reste sa matière de prédilection. Pour des raisons évidentes de coût, Pompon n’est pas un nantis et son succès récent ne lui assure pas encore les revenus nécessaires au travail du marbre et de la pierre.
Ça ne saurait tarder !
Pompon aime travailler le plâtre :
Le travail du plâtre a de nombreux avantages pour François Pompon. Sa méthodologie de travail, le « Blanc modelé », se caractérise par un tâtonnement, une multitude de retouches et un ajout de matière appliquée par pression d’un pouce.
Sans cesse modifiée, la sculpture se veut être une parfaite représentation de la teinte exacte de l’ombre donné par la nature sur les différentes parties de l’animal.
Pompon a également de grandes appétences pour travailler le marbre et la pierre : sa formation de tailleur spécialiste en monuments funéraires n’y est pas pour rien. Mais leurs coûts s’avèrent très élevés.
Il faudra attendre quelques années et l’opulence du succès pour découvrir Pompon travaillant le marbre, mais pas seulement.
C’est ainsi que les réductions de la première version seront réalisées en céramique de Sèvres : 632 pièces au total.
La création de l’Ours Pompon en marbre impose la suppression de l’écart entre les pattes antérieures et postérieures pour en assurer sa solidité et stabilité.
En 1926, quatre Ours en pierre de Lens sont commandés. Les lignes finales de l’Ours se concrétisent, mais il faudra attendre 1930 pour une version définitive en marbre.
Les modèles en bronze, dans un premier temps édités en 20 exemplaires, seront à nouveau commercialisés en 20 exemplaires à partir de 1926. Ces derniers témoignent des nombreuses hésitations visibles dans leur différence de conception.
Tout au long de sa vie, François Pompon chercha le meilleur moyen de respecter le beau et la tradition.
Au fil des années, le Grand Ours blanc est devenu la personnification du célèbre sculpteur. Si il y a bien une seule et unique pièce à acquérir de ce grand animalier, c’est bien cet Ours !
En l’admirant, nous ressentons une envie irrépressible de le caresser; l’oeuvre attire la main et le regard tel un aimant. C’est le cas pour cet Ours Pompon en cristal de Baccarat, en collaboration avec la Réunion des Musées Nationaux. Une sculpture réalisée d’après le moule original de François Pompon donnant ainsi une vraie valeur artistique et culturelle à cette figurine en cristal.
L'Exposition Pompon - Orlinski à Saulieu :
Richard Orlinski et François Pompon se définissent par le respect de l’animal, deux artistes reflets de leur époque.
Alors que Pompon commençait par créer de petites œuvres, Richard Orlinski a fait le chemin inverse. Ce dernier crée des oeuvres monumentales, pour enfin les réduire afin d’atteindre un public bien plus large. Paris, Courchevel, Aspen, Genève, Cannes, Orlinski est partout.
Tandis que François Pompon part d’une vision, Richard Orlinski part d’un concept, où la robotique et la technologie façonnent la forme et la lumière. L’atelier d’Orlinski est semblable à une usine de haute technologie.
On y rencontre des fondeurs, peintres, menuisiers, marbriers … La robotique est au cœur de la création, il a dernièrement fait l’acquisition de machines de pliage industriel développées par Renault.
Cette exposition présentait le contraste entre ces deux artistes, fascinés par le monde animal.
L’exposition fut un succès, au cœur d’une bourgade médiévale, Saulieu. Une œuvre inattendue pour les Bourguignons et les touristes.
Le musée de François Pompon à Saulieu :
Le musée François Pompon fut inauguré le 23 juin 1993, à Saulieu. Niché dans un hôtel particulier du XVIIe siècle, il rend hommage à l’un des plus grands sculpteurs animaliers.
On y découvre ses travaux de jeunesse, comme les terres cuites : Saint Andoche martyr (1874), Curé de Saulieu (1880), ou encore le buste de son père Alban (1885).
La seconde oeuvre de Pompon, le règne animal, nous surprend tant par sa grande diversité : animaux sauvages, domestiques ou exotiques.
Rendez-vous au 3 Place Dr Roclore, 21210 Saulieu :